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La loi relative à l´assurance contre les dommages causés par le terrorisme est entrée en vigueur le 1er mai 2008

Par Béatrice Toussaint [Thelius]

Jeudi 05.06.08

I.- Champ d'application

Inspirée du régime néerlandais (cf. note 1) , la loi du 1er avril 2007 (cf. note 2) organise la couverture obligatoire du terrorisme pour certains types de contrat d'assurance dans la mesure où ils concernent des risques situés en Belgique, à savoir lorsque :

a) le preneur d'assurance ou la personne morale a sa résidence ou son établissement en Belgique;

b) le bien immeuble (et son contenu) sont situés en Belgique;

c) le véhicule assuré est immatriculé en Belgique; et enfin lorsque

d) le contrat, d'une durée égale ou inférieure à 4 mois, est relatif à des risques encourus au cours d'un voyage ou de vacances.

Le terrorisme devait déjà être couvert par certains contrats d’assurance (accident du travail, responsabilité civile automobile, responsabilité civile incendie/explosion pour les établissements habituellement accessibles au public et incendie risques simples).

La loi instaure la couverture obligatoire du terrorisme pour les assurances relevant des branches 1 (accidents), 2 (maladie) et 21 à 23 (vie - liées ou non à des fonds de placement).

Il importe de souligner que le régime n'est pas applicable aux contrats d'assurance couvrant exclusivement les dommages causés par le terrorisme (en principe destinés aux entreprises) ou les dommages à une installation nucléaire ni aux contrats d’assurance relatifs à des véhicules ferroviaires, aériens ou maritimes.

La loi ne s'applique pas non plus à la valeur de rachat théorique des assurances vie.


II.- Définition du terrorisme

La loi définit le terrorisme comme "une action ou une menace d'action organisée dans la clandestinité à des fins idéologiques, politiques, ethniques ou religieuses, exécutée individuellement ou en groupe et attentant à des personnes ou détruisant partiellement ou totalement la valeur économique d'un bien matériel ou immatériel, soit en vue d'impressionner le public, de créer un climat d'insécurité ou de faire pression sur les autorités, soit en vue d'entraver la circulation et le fonctionnement normal d'un service ou d'une entreprise" (article 2, alinéa 1).

Afin de préserver l’unité d’interprétation de cette notion, un comité ad hoc a été constitué. Il est chargé, en se basant sur l’entièreté de la définition (cf. note 3) , de juger si un événement concret doit ou non être considéré comme constituant du terrorisme.


III.- Régime de solidarité

La loi met en place un régime de solidarité qui se concrétise par une personne morale, l’ASBL TRIP (Terrorism Reinsurance & Insurance Pool) constituée le 1er février 2008 par les assureurs et les réassureurs (cf. note 4) afin de répartir entre les participants les engagements de ceux-ci en cas de terrorisme.

L'ASBL TRIP et l'Etat belge couvrent conjointement les événements survenus au cours d'une année civile à concurrence d'un milliard d'euros pour les engagements contractés par les membres de l'ASBL TRIP. Ce montant est indexé annuellement et peut être revu par arrêté royal pour tenir compte de l’évolution de la société, de la capacité financière du secteur de l’assurance et de la réassurance et de l’évolution du risque de terrorisme.

L'Etat belge n'est tenu d'intervenir que lorsque les tranches de couverture fournies par les assureurs et réassureurs via l’ASBL TRIP (700 millions d’euros) sont épuisées. Son intervention est limitée à un montant maximum de 300 millions d'euros (montant prévu par la loi à défaut d'accord pris sur une base annuelle entre l'Etat belge et la personne morale).

Il est important de souligner que le régime de solidarité n'entre pas immédiatement en action si des dommages causés par le terrorisme doivent être indemnisés par un assureur. En effet, le Comité décide si un événement relève du champ d'application de la loi, d'initiative ou encore à la demande du Conseil des ministres ou d'un assureur adhérant au régime de solidarité via l'ASBL TRIP.


IV.- Procédure

Si un événement est reconnu comme du terrorisme par le Comité, le total des dommages à indemniser sera limité au montant d'un milliard d'euros par année civile et les indemnités versées seront supportées par l'ASBL TRIP.

Si, au cours d'une année civile, un ou plusieurs actes de terrorisme donnant lieu à un recours au mécanisme sont déjà intervenus, le montant d'un milliard d'euros sera diminué des indemnités déjà accordées suite à ces actes de terrorisme antérieurs.

Le Comité devra, dans la mesure où le Roi a omis de le faire, déterminer si plusieurs événements doivent être considérés comme constituant un seul événement.

Il devra statuer, à intervalles réguliers, sur le pourcentage d'indemnisation que les membres de l’ASBL TRIP devront payer (les assureurs restent néanmoins libres de payer un pourcentage d'indemnisation plus élevé).

L'assureur qui n'est pas membre de l'ASBL TRIP ne pourra bénéficier du régime de solidarité et devra indemniser à ses frais les dommages dus en application de la police d'assurance concernée.

Les assureurs bénéficieront de limitations en cas de dommages causés à des biens immobiliers et/ou à leur contenu (limitation à 75 millions d'euros par preneur d'assurance, par site assuré et par année) ou en cas d'attentat terroriste de très grande ampleur (via arrêté royal, limitation et répartition dans le temps des indemnités à payer pour prévenir une mise en péril du système financier qui résulterait de la libération immédiate des moyens financiers nécessaires).


V.- Subrogation

Afin d'éviter qu'une partie du montant disponible soit affectée à des mutualités et à des assureurs accident du travail, le droit de subrogation de ceux-ci ne peut être exercé qu'après indemnisation complète sur base de la nouvelle loi, de la personne lésée ou de ses ayants droits.

L'Etat, les Communautés et les Régions qui, ont décidé, dans l'attente d'une indemnisation (définitive) par les assureurs, de rembourser ou d'avancer aux victimes le montant de certaines dépenses, sont subrogés, à concurrence du montant de cette indemnisation, dans les droits et actions de la personne lésée contre l'assureur.


VI.- Application aux contrats en cours

Les contrats pour lesquels la couverture terrorisme est à présent obligatoire et qui excluaient au 1er mai 2008 les dommages causés par le terrorisme, devront couvrir ces dommages dès la prochaine échéance annuelle de la prime.

Pour tout contrat de ce type conclu après le 1er mai 2008, la couverture terrorisme doit être intégrée.

Les contrats pour lesquels la couverture terrorisme reste facultative doivent, afin d'éviter l'application de la loi, prévoir, en termes explicites et précis, que les dommages causés par le terrorisme sont exclus.



Béatrice TOUSSAINT
Avocate au Barreau de Bruxelles
Association Thelius



Notes :

(1) Noodwet Financieel verkeeer (http://terrorismeverzekerd.nl)

(2) Loi du 1er avril 2007 relative à l'assurance contre les dommages causés par le terrorisme (MB 15.05.2007)

(3) Doc. Parl., Chambre, Doc. 51 -2848 - N° 1 – Projet de loi relatif à l’assurance contre les dommages causés par le terrorisme , p. 6

(4) Des personnes morales qui ne sont pas des entreprises d’assurances peuvent également adhérer au système mais l’objectif poursuivi est de répartir non les dommages encourus par les participants eux-mêmes mais les dépenses que doivent engager les participants pour indemniser les dommages en exécution des contrats conclus (voyez la demande de la SNCB et l’avis de la Commission des Assurances du 4 septembre 2007 sur l’assurance contre les dommages causés par le terrorisme pour les secteurs des chemins de fer, de l'aviation et de la navigation - http://www.cbfa.be).


Source : DroitBelge.Net - Actualités - 05 juin 2008


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