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Le greffier devient le sherpa procédural du justiciableChristophe BedoretJeudi 23.01.25 |
Depuis le 7 juin 2024, le greffier est investi, au profit des justiciables, de nouvelles tâches — octroi d’informations de nature purement procédurale et d’assistance technique — qui s’inscrivent dans la logique du service public et contribuent à rendre la justice moins opaque.
L’article 168, alinéa 3, du Code judiciaire, prévoit que l’une des tâches du greffier est de s’assurer de l’accès du greffe au public, ce qui implique un devoir à la fois d’information sur le plan procédural et d’assistance technique (cf. Note 1).
Sur la base de ce postulat, l’article 56 de la loi du 15 mai 2024 portant dispositions en matière de digitalisation de la justice et dispositions diverses II (M.B., 28 mai 2024), entrée en vigueur le 7 juin 2024, complète l’éventail des tâches dévolues au greffier par ledit article 168, alinéa 3, du Code judiciaire, et ce, à un double titre.
Premièrement, le greffier répond à toutes les demandes des justiciables pour leur fournir des informations générales, de nature purement procédurale, concernant leurs dossiers (cf. Note 2).
Ce prescrit ne déroge pas à l’article 297 du Code judiciaire, en vertu duquel les membres des cours, tribunaux, parquets et greffes ne peuvent, soit verbalement, soit par écrit, assumer la défense des parties ni donner à celles-ci des consultations ; cette disposition découle du principe général assurant la bonne administration de la justice, qui requiert indépendance et impartialité (cf. Note 3).
Le devoir d’information pesant désormais sur le greffier est assorti des cinq balises suivantes :
1. Seules des informations générales sont fournies ;
2. Sur des aspects exclusivement procéduraux ;
3. Moyennant une demande du justiciable ;
4. Concernant son propre dossier ;
5. Sans que cela s’apparente à une consultation, laquelle intègre une notion de conseil.
Rappelons que le greffier, dès lors qu’il est chargé de missions importantes dans le cadre de l’administration de la justice, doit faire preuve d’indépendance et d’impartialité (cf. Note 4).
Deuxièmement, le greffier assiste techniquement les justiciables dans l’utilisation du matériel et des logiciels mis à la disposition du public dans les cours et tribunaux, et dans leurs greffes (cf. Note 5).
Les nouvelles tâches ainsi confiées au greffier sont amenées à bouleverser son quotidien, à valoriser sa fonction et à accentuer ses responsabilités.
Le législateur belge n’est toutefois pas un précurseur en la matière, comme en témoigne un modèle européen (cf. Note 6).
En tout état de cause, les nouvelles dispositions qui confèrent au greffier de nouvelles tâches au profit du justiciable nous paraissent donner corps aux principes généraux de la bonne administration de la justice et du droit d’accès au juge.
Christophe Bedoret
Conseiller à la cour du travail de Mons
Magistrat
Chargé d'enseignement à l'UMons
Notes:
1. Doc., Ch., n°55 3945/001, pp. 33-34.
2. Art. 168, al. 3, 8°, C. jud.
3. Cass. (3ᵉ ch.), 3 avril 2006, JT, 2007, p. 154.
4. C.C., 15 octobre 2015, n°140/2015, n°6089.
5. L’article 18 des instructions au greffier du tribunal de la fonction publique de l’Union européenne du 21 mai 2014 (J.O., 14 juillet 2014) dispose que le greffier fournit aux parties, à leur demande, des informations sur la pratique suivie en application du règlement de procédure, des instructions pratiques aux parties, des instructions au greffier, de la décision e-Curia et des conditions d’utilisation de l’application e-Curia, afin d’assurer le bon déroulement des procédures.
Cet article a été précédemment publié par le même auteur dans le Bulletin Social et Juridique.(www.lebulletin.be)