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Droit de superficie

Par Valentine Kervyn [Hirsch & Vanhaelst]

Jeudi 04.04.24


Un jugement intéressant du Tribunal de première instance de Flandre occidentale règle la question du « boni de liquidation » lorsque la société dissoute avait préalablement constitué un droit de superficie au profit de ses actionnaires.



Rappel des principes

Le droit de superficie est un droit réel qui consiste à avoir des bâtiments, ouvrages ou plantations, en tout ou partie, sur, au-dessus ou en-dessous du fonds d'autrui.

Ce droit de superficie aboutit à scinder la propriété du sol et la propriété des constructions ou plantations y érigées.

Il s’agit d’une dérogation légale à la règle civile de l’accession selon laquelle toutes les constructions, plantations et ouvrages sur un terrain ou en sous-sol sont présumés appartenir au propriétaire du terrain.

Le droit de superficie s’éteint à l'expiration du terme convenu, par confusion, par destruction du terrain ou par prescription trentenaire. En revanche, contrairement à l’usufruit, le décès du superficiaire ne met pas fin au droit de superficie, sauf disposition contractuelle en ce sens.

A l’échéance du droit de superficie, le tréfoncier, c’est-à-dire le propriétaire du tréfonds, récupère la pleine propriété de l’ensemble, en ce compris les constructions érigées par le superficiaire.


Sens des opérations

Il n’est pas rare qu’un dirigeant octroie à sa société un droit de superficie pour une certaine durée et qu’à l’expiration de ce droit, les bâtiments érigés par la société soient transférés de plein droit au dirigeant-tréfoncier (ce qui pose la question de l’indemnisation à payer à la société).

La situation inverse existe aussi : une société concède un droit de superficie à ses dirigeants et/ou actionnaires qui construisent un bâtiment sur le fonds.


Conséquences fiscales en cas de dissolution de la société tréfoncière ?

Le Tribunal de première instance de Flandre Occidentale, division Bruges, a été amené à rendre une décision à ce sujet (15 mai 2023, rôle n° 21/2976/A).

En résumé, l’administration fiscale considérait que le droit de superficie s’était éteint par anticipation, suite à la dissolution de la société. De ce fait, la société (tréfoncier) récupérait le bâtiment et, selon le fisc, le boni de liquidation (taxable) distribué aux actionnaires comprenait tant le terrain que le bâtiment.

Le tribunal n’a pas suivi la thèse de l’administration fiscale. Selon lui, la dissolution d’une société, qui est assimilée à un décès, ne constitue pas une cause d’extinction du droit de superficie.

Le tribunal considère donc que, dans le cadre de la liquidation de la société, l’extinction du droit de superficie s’est produite par confusion et non du fait de la dissolution de la société.

En conséquence, au moment de la liquidation, le droit de superficie et le bâtiment érigé par les actionnaires, ne se trouvent pas dans le patrimoine de la société liquidée et ne peuvent être pris en compte pour le calcul du boni de liquidation.


Conclusion

Les opérations de démembrement sont des opérations complexes aux enjeux financiers souvent importants. Il est essentiel d’anticiper les questions, même indirectes, que peuvent faire naître ces structurations.



Valentine Kervyn
Avocate au barreau de Bruxelles - Hirsch & Vanhaelst





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