L’Autorité de la concurrence (anciennement appelée Conseil de la concurrence), est une autorité administrative indépendante chargée de lutter contre les pratiques anticoncurrentielles et d’étudier le fonctionnement des marchés. Elle existe dans tous les pays de l’Union européenne. En Belgique, elle s’appelle Autorité belge de la Concurrence et siège à 1210 Bruxelles, City Atrium, Rue du Progrès 50.
Les autorités de concurrence européennes considèrent que le prix de vente imposé est une restriction de concurrence interdite par l’article 101, paragraphe 1, du Traité sur le fonctionnement de l’Union Européenne (TFUE).
Un contrat de franchise prévoyant que les prix sont imposés par le franchiseur est donc nul.
Une restriction de concurrence interdite peut cependant bénéficier d’une exemption automatique quand un règlement européen le prévoit. C’est le cas pour les contrats de franchise sauf si une clause prévue dans le contrat ou révélée par la mise en œuvre du contrat est tellement restrictive qu’elle empêche de bénéficier de cette exemption.
Le contrat de franchise est en principe exempté automatiquement par l’article 4 (a) du règlement d’exemption du 20 avril 2010 de la Commission européenne qui régit notamment les contrats de franchise. Mais l’existence d’un prix de revente imposé que le franchisé doit respecter dans ses relations avec ses clients empêche le franchiseur de bénéficier de l’exemption automatique prévue. Seule une exemption individuelle pourrait être octroyée s’il est démontré par le franchiseur que le prix de vente imposé génère des gains d’efficience à même de contrebalancer les effets anticoncurrentiels.
Dès lors, si un fournisseur ou un fabriquant peut fixer le prix de vente à ses distributeurs dans un réseau de distribution intégré lui appartenant, il ne peut le faire si ses distributeurs sont indépendants. S’il recourt à des distributeurs indépendants, comme par exemple des franchisés, ceux-ci doivent être libres de fixer les prix de revente des produits.
Cependant, les prix de vente conseillés par le franchiseur sont permis sauf s’ils sont accompagnés d’une pratique qui pourrait permettre de qualifier ces prix de vente conseillés comme des prix de vente imposés indirectement.
L’Autorité française de la concurrence vient d’infliger au fabricant de thés Dammann Frères une sanction de 226.000 euros pour avoir limité, d’avril 2015 à juin 2017, la liberté tarifaire de ses distributeurs en fixant le prix de vente des produits de sa marque lorsqu’ils étaient proposés en ligne par ces distributeurs (Décision n° 20-D-20 du 3 décembre 2020).
L’Autorité a jugé que la société Dammann Frères, sous couvert de communiquer aux distributeurs des prix conseillés, leur avait en réalité imposé des prix de revente. Le non-respect de ces prix était en effet sanctionné. Parmi les sanctions : suppression ou modification des remises accordées, suppression de leur mention dans la liste de distributeurs figurant sur le site Internet, retard ou suppression de leurs livraisons, et parfois même rupture unilatérale de leurs relations commerciales avec le fournisseur.
En empêchant ses distributeurs vendant en ligne de déterminer librement leurs prix de vente sur Internet, Dammann Frères a en fait privé les consommateurs des bénéfices résultant d’une concurrence sur les prix entre les distributeurs.
Cette décision française repose sur les principes fondamentaux du droit européen de la concurrence. Elle doit inciter les franchiseurs actifs dans les pays de l’Union Européenne ou liés aux règles de droit européen (comme la Belgique ou le Royaume-Uni pour l’instant malgré le Brexit) à faire preuve d’une prudence particulière dans la gestion de leurs réseaux de franchise et dans la pratique des prix de vente conseillés qui ne peuvent être des prix de vente indirectement imposés.
A noter que cette décision très récente pourrait faire l’objet d’un recours.
Pierre Demolin
Avocat aux barreaux de Mons et de Paris
Cabinet Demolin Brulard Barthélémy (www.dbblaw.eu)
Version mise à jour le 5 janvier 2021.
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