L’émission d’actions (anciennement dénommées « parts sociales ») sans droit de vote était déjà possible dans l’ancien Code des sociétés en vertu de son article 240. Ces actions étaient toutefois soumises à de nombreuses restrictions. Comme l’expliquent les travaux parlementaires du nouveau Code, ces restrictions paraissaient cependant avoir peu de sens, tout comme l’obligation de compenser l’absence de droit de vote par un dividende privilégié (cumulatif ou non). Le nombre de cas dans lesquels les titulaires d’actions sans droit de vote se voyaient impérativement attribuer un droit de vote était, par ailleurs, excessif. Ces dispositions restrictives rendaient finalement l’utilisation des actions sans droit de vote très peu attractive, de sorte que de telles actions étaient rarement émises (Doc. Parl., Ch. repr., sess. ord. 2017-2018, n° 54-3119/001, p. 143).
Par conséquent, le législateur a décidé d’assouplir ces restrictions. Tout d’abord, le CSA supprime l’obligation d’attribuer un dividende privilégié aux actions sans droit de vote. Ensuite, le nouvel article 5:47 du CSA restreint le nombre de cas dans lesquels les actions sans droit de vote donnent impérativement droit à une voix par action, à savoir:
1. lorsqu’une décision qui touche à la modification des droits attachés aux classes d’actions doit être prise (art. 5:102 CSA);
2. en cas de transformation de la société ;
3. en cas de fusion transfrontalière entrainant la dissolution de la société ;
4. en cas de déplacement transfrontalier du siège conformément à l'article 14:15 du CSA.
Il est à noter qu’une SRL ne peut se limiter à n’émettre que des actions sans droit de vote. En effet, conformément à l’article 5:40 du CSA, la SRL doit émettre au moins une action dotée d’un droit de vote, sans quoi l’assemblée générale perdrait tout son sens.
En outre, le paragraphe 2 de l’article 5:47 du CSA prévoit désormais que lorsqu’un dividende privilégié a été attribué aux actions sans droit de vote, ce qui, pour rappel, était obligatoire dans l’ancien Code, celles-ci bénéficient néanmoins d’un droit de vote si les dividendes privilégiés n’ont pas été entièrement mis en paiement durant deux exercices successifs. Le droit de vote cesse à nouveau lorsqu’est distribué un dividende qui, additionné au dividende de l’exercice concerné, est équivalent au montant des dividendes privilégiés non distribués.
L’article 5:47 du CSA est impératif, de sorte qu’il ne pourrait y être dérogé dans les statuts, dans la décision d’émission, ou encore dans une convention d’actionnaires. En revanche, rien n’interdit de prévoir, de manière statutaire ou extrastatutaire, une protection renforcée des titulaires d’actions sans droit de vote, en allant au-delà de ce que prévoit le nouveau Code.
Caroline Kempeneers
Avocate - Médiatrice agréée en matière civile et commerciale
Solis Law Firm
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