1. La communication entre la personne morale et les différents intervenants
Cadre général – La priorité à la voie électronique
La communication entre la personne morale (qu’il s’agisse d’une société, d’une association ou d’une fondation) et les différents intervenants a évolué de manière importante ces dernières années.
Parmi les intervenants, on vise les membres d’une association, les associés/actionnaires d’une société, le titulaire d’un titre émis par une société (obligation, droit de souscription, etc.), le titulaire d’un certificat émis en collaboration avec une société, les gérants/administrateurs et le commissaire.
La communication par la voie électronique est devenue la norme. Cependant, le CSA a souhaité tenir compte de cette évolution, sans pour autant rendre obligatoire la communication par cette voie.
Communication d’une adresse électronique par une personne morale aux différents intervenants (art. 2 :31 CSA)
Toute personne morale a la faculté de communiquer une adresse électronique aux différents intervenants (c’est une obligation dans le chef d’une société cotée).
Si tel est le cas, les communications adressées à cette adresse e-mail seront considérées comme effectivement reçues par la personne morale.
La communication de l’adresse électronique se fera en l’indiquant dans l’acte constitutif, voire dans les statuts. Si cela n’a pas été fait dans l’acte constitutif, l’organe d’administration peut, à tout moment, adopter et publier une adresse électronique.
Si l’adresse électronique doit être modifiée, il reviendra à l’organe d’administration d’en prendre l’initiative. Même si cette adresse figure dans les statuts, comme le précise le texte de loi (une modification des statuts s’impose alors, mais à l’initiative de l’organe d’administration). La modification doit être communiquée aux différents intervenants, soit à l’adresse électronique communiquée par l’intervenant concerné, soit par courrier ordinaire.
Communication d’une adresse électronique par un intervenant à la personne morale (art. 2 :32 CSA)
De même, les différents intervenants peuvent prendre l’initiative de communiquer une adresse électronique à la personne morale.
Toute communication faite à cette adresse est réputée intervenue valablement.
L’intervenant conserve à tout moment la faculté de communiquer une autre adresse électronique ou d’informer la personne morale qu’elle ne souhaite plus communiquer par la voie électronique.
La communication par la voie électronique devient la norme de sorte que la personne morale fera usage de cette voie avec les intervenants qui auront fait ce choix. Pour les intervenants qui n’auront pas fait ce choix ou y auraient renoncé, la personne morale assurera la communication par courrier ordinaire. Elle veillera à envoyer le courrier ordinaire le même jour que les communications électroniques.
Convocation à l’AGO d’une SRL – Influence des nouvelles règles de communication
Voici une conséquence concrète de l’évolution des modes de communication entre la personne morale et les différents intervenants.
Dans le Code des sociétés, il était prévu que la convocation à l’assemblée générale ordinaire d’une SPRL devait se faire par lettre recommandée. Les destinataires avaient cependant la faculté d’accepter individuellement et par écrit un autre mode de communication (art. 268 du Code des sociétés).
Le CSA se réfère pour sa part aux modes de communication exposés ci-dessus. Ce qui signifie que la convocation est adressée aux différents destinataires par courrier électronique ou par courrier ordinaire si la SRL ne dispose pas d’adresse électronique au nom des destinataires concernés (art. 5:83, § 1er CSA).
Il en va de même pour la convocation à l’assemblée générale ordinaire d’une SA lorsque l’ensemble des actions, obligations convertibles, droits de souscription ou certificats émis avec la collaboration de la société sont nominatifs (art. 7:127, § 1er, al. 3 CSA - nous n’abordons pas ici les règles particulières concernant les sociétés cotées).
On peut imaginer les difficultés de preuve qui pourraient être engendrées par l’envoi de la convocation par courrier ordinaire, si le destinataire prétend ne pas l’avoir reçue.
2. L’élection de domicile au siège de la personne morale
Le CSA prévoit désormais la faculté pour un membre de l’organe d’administration ou pour le délégué à la gestion journalière de faire élection de domicile au siège de la personne morale pour toutes les questions qui concernent l’exercice de son mandat (art. 2:54 CSA).
L’intérêt de cette mesure est d’éviter que le membre de l’organe d’administration ou le délégué à la gestion journalière ne soit tenu de communiquer et de publier son adresse privée.
Imaginons qu’un administrateur d’une société voit sa responsabilité mise en cause. En cas d’élection de domicile au siège de la société, la citation sera signifiée au siège de la société et non plus au domicile privé de l’administrateur.
A partir de quand l’élection de domicile produit-elle ses effets ?
Pour que l’élection de domicile produise ses effets (pour qu’elle soit opposable aux tiers), il faut qu’elle soit publiée conformément à l’art. 2 :18 du CSA.
Lors de la nomination du membre de l’organe d’administration, le procès-verbal de l’assemblée générale chargée de le nommer actera l’élection de domicile. L’acte de nomination sera ensuite déposé au greffe du tribunal de l’entreprise et ce, dans les 30 jours de l’acte (art. 2 :8 à 2 :12 CSA). Le greffier se chargera ensuite d’en assurer la publication aux annexes au Moniteur belge dans les 10 jours du dépôt au greffe (art. 2 :13 à 2 :17 CSA).
Il en va de même pour ce qui concerne l’élection de domicile de la personne chargée de la gestion journalière. Sachant que dans ce cas, il s’agira généralement d’une décision de l’organe d’administration lui-même, et non de l’assemblée générale.
Election de domicile au siège de la personne morale ou au lieu d’exercice de l’activité professionnelle ?
Par la voie d’un amendement, le CSA a été complété en vue de prévoir la faculté pour les personnes qui gravitent autour de la personne morale de faire élection de domicile au lieu où ils exercent leur activité professionnelle : « chaque fondateur, associé, actionnaire ou membre et (…) chaque membre d’un organe d’administration, délégué à la gestion journalière, commissaire, liquidateur ou administrateur provisoire peut élire domicile au lieu où il poursuit son activité professionnelle. Dans ce cas, seule cette adresse sera communiquée en cas de consultation du dossier » (art. 2 :7, § 5, CSA).
Le CSA précise que cette disposition s’applique « sans préjudice de l’article 2 :54 » qui concerne le régime exposé ci-avant. Le membre de l’organe d’administration ou le délégué à la gestion journalière a donc le choix soit de renseigner son domicile privé, soit d’élire domicile au siège de la personne morale (régime exposé ci-avant), soit de renseigner le lieu où il poursuit son activité professionnelle, comme le précise l’article 2 :7 du CSA.
On remarquera cependant que dans ce dernier cas, il est précisé que seule l’adresse communiquée sera transmise « en cas de consultation du dossier » au greffe du tribunal de l’entreprise. Qu’en est-il par contre de l’adresse à communiquer aux annexes au Moniteur belge ? Le texte ne le précise pas. A suivre l’avis de l’Autorité de protection des données, sur lequel se fonde l’amendement, on comprend que seule l’adresse d’exercice de l’activité transmise par la personne concernée devrait être publiée (considérant n° 19 de l’avis du 07/11/2018). Le texte de loi ne le précise cependant pas explicitement.
La pratique devrait nous renseigner davantage à ce sujet.
Caroline Kempeneers
Avocate - Médiatrice agréée en matière civile et commerciale
Solis Law Firm
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