Forme de l’acte constitutif
Les principes prévus sous l’ère du Code des sociétés et de la loi du 27 juin 1921 ont peu évolué au sujet de la forme de l’acte constitutif, nécessaire à la constitution d’une personne morale.
Ainsi, les sociétés à responsabilité limitée (SRL), les sociétés coopératives (SC), les sociétés anonymes (SA), les sociétés européennes (SE) et les sociétés coopératives européennes (SCE) sont constituées, à peine de nullité, par un acte authentique. Il en va de même pour les AISBL et les fondations. Pour les autres formes sociétaires et les ASBL, le libre choix entre la forme privée ou authentique est maintenu par le CSA (art 2:5 CSA).
Distinction entre les statuts et les autres dispositions de l’acte constitutif
Comme le précise l’exposé des motifs du CSA, les termes « acte constitutif » et « statuts » se confondaient souvent sous l’ancien Code, ce qui donnait lieu à des contradictions dans la pratique, et notamment au sujet des dispositions qui doivent figurer dans l’un ou l’autre document.
Par conséquent, le législateur précise désormais clairement les dispositions qui doivent figurer obligatoirement dans les statuts et celles qui peuvent figurer dans l’acte constitutif. Les données qui doivent obligatoirement figurer dans les statuts d’une personne morale diffèrent en fonction du type de personne morale, et sont reprises aux articles 2 :5 §1, al. 3 (pour les sociétés), 2 :5 §2, al. 2 (pour les ASBL), 2 :5 §3, al. 2 (pour les AISBL) et 2 :5 § 3, al. 3 (pour les fondations) du CSA. Cette distinction s’avère utile en pratique, notamment pour anticiper l’intervention d’un notaire. En effet, les statuts ne peuvent être modifiés que dans les formes prescrites pour l’établissement de ceux-ci, contrairement aux autres dispositions de l’acte constitutif qui peuvent être modifiées sans devoir respecter de telles exigences.
Devront ainsi obligatoirement figurer dans les statuts d’une société (art 2 :5 § 1, alinéa 3 CSA) :
• la forme légale de la société, sa dénomination et l'indication de la région dans laquelle le siège de la société est établi (art 2:8, §2, 1° CSA) ;
• la durée de la société lorsqu’elle n’est pas illimitée (art 2:8, §2, 3° CSA) ;
• le cas échéant, le montant du capital et le montant du capital autorisé (art 2:8, §2, 5° CSA) ;
• le début et la fin de chaque exercice social (art 2:8, §2, 7° CSA) ;
• les dispositions relatives à la constitution des réserves, à la répartition des bénéfices et du boni de liquidation de la société (art 2:8, §2, 8° CSA) ;
• le mode de nomination et de cessation de fonctions des personnes autorisées à administrer et à engager la société, l’étendue de leurs pouvoirs et les modalités d’exercice de ces derniers soit séparément, soit conjointement, soit en collège, et le cas échéant, la désignation des membres du conseil de surveillance, l’étendue de leurs pouvoirs et les modalités d’exercice de ces derniers (art 2:8, §2, 9° CSA) ;
• le cas échéant, la description précise du ou des buts qu’elle poursuit en plus du but de distribuer ou procurer à ses associés un avantage patrimonial direct ou indirect (art 2:8, §2, 11° CSA) ;
• la désignation de l’objet de la société (la terminologie « objet social » n’est plus utilisée par le nouveau CSA) (art 2:8, §2, 12° CSA) ;
• les lieu, jour et heure de l’assemblée générale ordinaire des associés ainsi que les conditions d’admission et d’exercice du droit de vote (art 2:8, §2, 13° CSA).
Devront obligatoirement figurer dans les statuts d’une ASBL (art 2 :5 §2, al.2) :
• la dénomination et l'indication de la région dans laquelle le siège de l'ASBL est établi (art 2 :9, § 2, 2°) ;
• le nombre minimum des membres ((art 2 :9, § 2, 3°) ;
• la description précise du but désintéressé qu'elle poursuit et des activités qui constituent son objet (art 2 :9, § 2, 4°) ;
• les conditions et formalités d'admission et de sortie des membres (art 2 :9, § 2, 5°) ;
• les attributions et le mode de convocation de l'assemblée générale ainsi que la manière dont ses résolutions sont portées à la connaissance des membres et des tiers (art 2 :9, § 2, 7°) ;
• le mode de nomination et de cessation de fonctions des administrateurs, ainsi que la durée de leur mandat (art 2 :9, § 2, 7° a)) ;
• le cas échéant, le mode de nomination et de cessation de fonctions des personnes habilitées à représenter l'ASBL conformément à l'article 9:7, § 2, l'étendue de leurs pouvoirs de représentation et la manière d'exercer leurs pouvoirs, en agissant soit individuellement, soit conjointement, soit en collège ((art 2 :9, § 2, 7° b)) ;
• le montant maximum des cotisations ou des versements à effectuer par les membres (art 2 :9, § 2, 8°) ;
• le but désintéressé auquel l'ASBL doit affecter son patrimoine en cas de dissolution (art 2 :9, § 2, 9°) ;
• la durée de l'ASBL lorsqu'elle n'est pas illimitée (art 2 :9, § 2, 10°).
A l’inverse, des dispositions comme l’adresse à laquelle le siège de la société est établi, la désignation des organes d’administration (non-statutaires), la composition des apports, etc. ne doivent pas être reprises dans les statuts et peuvent figurer dans les dispositions introductives ou finales de l’acte constitutif (Doc. parl., Ch. repr., sess. ord. 2017-2018, n° 54-3119/001, p. 40). Il est à noter que, contrairement aux dispositions qui doivent obligatoirement figurer dans les statuts, le CSA prévoit uniquement que ces données ne doivent pas être incluses dans les statuts, mais ne l’interdit pas non plus. Les fondateurs ont ainsi la possibilité d’inclure certaines de ces mentions dans les statuts ainsi que tout autre mention qu’ils jugeraient utile d’y insérer.
Dépôt au greffe
L’article 2:7 § 1, al. 1er du CSA maintient, comme cela était le cas auparavant, le principe de la constitution et de la conservation, pour chaque personne morale, d’un dossier tenu au greffe du tribunal de l’entreprise dans le ressort duquel la personne morale a son siège.
Ce dossier a pour objectif de permettre aux tiers avec lesquels toute personne morale traite de vérifier que celle-ci est légalement constituée, qu'elle a le droit d'exercer ses activités, que ses organes de représentation ont le pouvoir de l'engager, et, dans une société, si les associés ou actionnaires ont une responsabilité illimitée ou non. Il doit aussi permettre à tout intéressé de mettre en cause la responsabilité des membres des organes chargés de l'administration, de la surveillance ou du contrôle des personnes morales (art 2:7 §1, al. 2 CSA).
En outre, les sociétés sont tenues de s’enregistrer à la Banque-Carrefour des Entreprises (BCE), dans le registre des personnes morales, aux fins d’activer leur numéro d’entreprise (art 2:7 §1, al. 3 CSA).
Les divers documents à déposer dans le dossier de la société ou de l’association sont, quant à eux, repris aux articles 2:8 (pour les sociétés), 2:9 (pour les ASBL), 2:10 (pour les AISBL) et 2:11 (pour les fondations) du CSA.
En ce qui concerne le délai de dépôt de ces documents, les sociétés doivent désormais déposer ceux-ci au greffe dans les trente jours (contre quinze jours sous l’ancien Code, art 68 C. soc.) à compter de la date de l’acte définitif (art 2:8, §1 CSA). Par souci de cohérence, les associations et les fondations qui n’étaient soumises initialement à aucun délai en la matière, sont également tenues de déposer leurs actes endéans le même délai.
Enfin, le nouveau CSA permet expressément à tout intéressé de prendre connaissance gratuitement de tous les documents déposés relatifs à une personne morale déterminée et d’en obtenir, sur demande écrite ou verbale, copie intégrale ou partielle, sans autre paiement que celui des droits de greffe. Ces copies sont certifiées conformes à l'original, à moins que le demandeur ne renonce à cette formalité (art. 2:12, § 2, CSA).
Publication au Moniteur belge
Pour ce qui concerne la publication aux Annexes du Moniteur belge, l’ancien Code des sociétés octroyait un délai de quinze jours pour les sociétés (ancien art. 73 C. Soc) et de trente jours pour les associations et les fondations. Compte tenu des moyens technologiques disponibles actuellement, il a été décidé de ramener ce délai à dix jours pour toutes les personnes morales, à peine de dommages-intérêts contre les fonctionnaires auxquels l’omission ou le retard serait imputable (art. 2:13 CSA).
Les documents dont la publicité est obligatoire ne sont opposables aux tiers qu’à partir du jour de leur dépôt ou, lorsque la publication de ces documents en est également obligatoire conformément aux articles 2:14 (pour les sociétés), 2:15 (pour les ASBL), 2:16 (pour les AISBL) et 2:17 (pour les fondations) du CSA, à partir du jour de leur publication aux Annexes du Moniteur belge, sauf s’il est établi que le tiers en avait antérieurement connaissance. Les tiers peuvent néanmoins se prévaloir des documents dont le dépôt ou la publication n’a pas été effectué (art. 2:18 CSA).
Acquisition de la personnalité juridique (voir fiche sur les engagements au nom d’une personne morale en formation)
Les différentes personnes morales n’acquièrent pas la personnalité juridique au même moment et de la même manière.
Ainsi, la personnalité juridique est acquise aux sociétés, ASBL et fondations privées à compter du jour où est effectué le dépôt de l’extrait de leur acte constitutif au greffe du tribunal de l’entreprise dans le ressort duquel leur siège est situé (art. 2:6, §§ 1er, 2 et 4, al. 1er, CSA). Par exception, la société européenne (SE), la société coopérative européenne (SCE) et le groupement européen d’intérêt économique (GEIE) n’acquièrent la personnalité juridique qu’à dater de leur inscription au registre des personnes morales de la Banque-Carrefour des Entreprises (art. 2:6, § 1er, in fine, CSA). En outre, les AISBL et fondations d’utilité publique acquièrent la personnalité juridique à la date de l’arrêté royal portant leur reconnaissance (art. 2:6, §§ 3 et 4, al. 2, CSA).
Caroline Kempeneers
Avocate - Médiatrice agréée en matière civile et commerciale
Solis Law Firm
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