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La succession sur le plan du droit civil




A.L’ouverture de la succession


Le fait générateur de l’ouverture de la succession d’une personne est son décès.

Le patrimoine de cette personne devra alors être réparti entre ses différents héritiers, s’il en a, et/ou entre les différentes personnes qu’il aura désignées par testament et que l’on appelle légataires. En l’absence de tout héritier et de tout légataire, la succession sera dite « en déshérence » et recueillie par l’Etat.


B.Les « parts réservataires » et la « quotité disponible »


On ne dispose que d’une liberté limitée pour établir son testament ou pour procéder à des donations. Certains héritiers sont dits « réservataires ». Quoi que l’on fasse, ils auront droit à une partie de la succession appelée « part réservataire » ou, dans le langage courant, « réserve ». Il est donc impossible de les « déshériter ».

En présence de ces héritiers « réservataires », on ne peut donc disposer que d’une partie de sa succession, celle qui reste après déduction de toutes les « réserves ». On l’appelle « quotité disponible ».

Les héritiers « réservataires » sont le veuf ou la veuve du défunt, ses enfants et ses père et mère.

Si le défunt ne laisse pas de veuf ou de veuve, mais que par contre il laisse des enfants, la « part réservataire », et par conséquent la « quotité disponible », dépendra du nombre d’enfants.

• un enfant : la « part réservataire » est égale à la moitié de la succession, l’autre moitié étant donc la « quotité disponible » ;

• deux enfants : la « part réservataire » de chacun des enfants s’élève à un tiers de la succession, le troisième tiers étant la « quotité disponible » ;

• trois enfants : la « part réservataire » de chacun des enfants s’élève à un quart de la succession, le quatrième quart étant la « quotité disponible » ;

• plus de trois enfants : la « quotité disponible » sera égale à un quart de la succession, les enfants, quel que soit leur nombre, se partageront donc les trois quarts restants.

Exemples :

1)A qui possède un patrimoine de 100.000 EUR décède, après son épouse, et laisse un enfant. Ce dernier aura droit à 50.000 EUR. A pourra disposer librement des 50.000 EUR restants.

2)A qui possède un patrimoine de 100.000 EUR décède, après son épouse, et laisse six enfants. Il pourra disposer librement de 25.000 EUR. Les 75.000 EUR devront être partagés entre les six enfants. La « part réservataire » de chacun des enfants s’élèvera donc à 12.500 EUR.

Lorsque le défunt, veuf, ne laisse pas d’enfants mais seulement ses père et mère, la « part réservataire » des parents s’élève à la moitié de la succession. Si seul l’un de ses parents est encore en vie, sa « part réservataire » ne s’élève qu’à un quart de la succession.

Exemple :

A possède un patrimoine de 100.000 EUR. Il est veuf. Il décède sans laisser d’enfant. Ses parents auront droit à 50.000 EUR. Si seule sa mère est encore en vie à son décès, elle n’aura droit qu’à 25.000 EUR. Si ses deux parents sont décédés, il n’y a aucune « réserve » et toute la succession est disponible.

Lorsque le défunt laisse un conjoint, la « part réservataire » se composera des éléments suivants :

• l’usufruit (l’usufruit est un droit temporaire – et au maximum viager - qui permet de jouir d’un bien appartenant à un tiers – le nu-propriétaire - à charge d’en conserver la substance. A l’expiration de l’usufruit, la pleine propriété du bien revient au nu-propriétaire) de l’immeuble qui, au moment du décès, servait de logement familial, ainsi que de tous les meubles qui le garnissaient.

• l’usufruit de la moitié de la succession. Cette « réserve » doit être bien comprise. Si l’usufruit de l’immeuble conjugal et des meubles qui le garnissent a une valeur plus importante que l’usufruit de la moitié de la succession, le conjoint conserve l’usufruit intégral sur cet immeuble et le mobilier. Il s’agit donc du strict minimum auquel il a droit, quel que soit la valeur de la succession et donc même si celle-ci est composée uniquement de l’immeuble conjugal et des meubles qui le garnissent. Si par contre l’usufruit de l’immeuble conjugal et des meubles qui le garnissent a une valeur moindre que l’usufruit de la moitié de la succession, le conjoint a droit à un « complément » afin de constituer effectivement une « réserve » équivalente à l’usufruit de la moitié de la succession.

Lorsque le défunt laisse un conjoint et des enfants, les « parts réservataires » doivent être combinées.

Lorsque le défunt laisse une veuve et un enfant, nous avons vu que l’enfant avait une « réserve » égale à la moitié de la succession en pleine propriété et que le conjoint avait droit à l’usufruit sur la moitié de la succession. La quotité disponible est égale à la moitié de la succession. Si le défunt en a disposé totalement. La veuve reconstituera alors sa réserve en prélevant à égalité sur la « part réservataire » de l’enfant et sur la « quotité disponible ». L’enfant aura donc droit à un quart en pleine propriété et un quart en nue-propriété, la « quotité disponible » sera également de un quart en pleine propriété et de un quart en nue-propriété, la veuve aura donc bien droit à la moitié de la succession en usufruit. En toute hypothèse, quelle que soit la valeur de la succession, la veuve aura droit à l’usufruit sur l’immeuble conjugal et le mobilier qui le garnit.

Lorsque le défunt laisse un conjoint et ses parents, on applique le même mécanisme que celui visé ci-dessus.

Ainsi si le défunt a disposé, comme il en a le droit, de la moitié de la succession, la veuve reconstituera sa réserve en puisant à égalité sur les « parts réservataires » de chacun des parents et sur la « quotité disponible ». Il prélèvera donc un sixième en usufruit chez chacun des parents et un sixième en usufruit sur la « quotité disponible » de façon à disposer de trois sixièmes en usufruit, soit la moitié en usufruit. Les parents disposeront donc chacun de un douzième en pleine propriété et de deux douzièmes en nue-propriété, la « quotité disponible » sera égale à quatre douzièmes en pleine propriété et deux douzièmes en nue-propriété, la veuve aura donc bien droit à six douzièmes en usufruit, soit exactement la moitié de l’usufruit de la succession.

On le voit les règles relatives aux « parts réservataires » et à la « quotité disponible » peuvent s’avérer très complexes. Il importe d’en tenir compte lors de l’élaboration de toute planification successorale afin d’éviter que les dispositions testamentaires rédigées ou les donations effectuées, préalablement au décès, puissent être remises en cause par des héritiers réservataires.


C.Succession testamentaire et succession ab intestat


On l’a vu, une succession peut être testamentaire ou ab intestat quand le défunt n’a pas fait de testament. Dans ce dernier cas, ce sont les règles de dévolution légale prévue par le Code civil qui s’appliqueront. Nous ne les aborderons pas ici. En effet, l’objet de cette contribution étant l’élaboration d’une planification successorale, on présume que la dévolution légale ne trouvera pas à s’appliquer.

Un même décès peut néanmoins donner lieu à la fois à l’application des règles de la succession ab intestat et à l’application des règles de la succession testamentaire. Par exemple, parce que le testament ne contient que des dispositions fragmentaires et doit être « complété » par l’application des dispositions légales.

Le testament est un acte par lequel une personne dénommée « testateur » dispose, pour le temps où il n’existera plus, de tout ou partie de ses biens.

On appelle « legs » les dispositions comprises dans un testament par lesquelles le testateur répartit sa fortune totalement ou partiellement.

On distingue trois types de legs :

• le legs universel consiste à laisser tous ses biens à une ou plusieurs personnes ou institutions.

Exemple : « Je laisse tous mes biens à Monsieur… »

• le legs à titre universel consiste à laisser une quotité de sa succession, à laisser tous les meubles ou tous les immeubles ou encore à laisser une quote-part de tous les meubles ou de tous les immeubles à une ou plusieurs personnes déterminées.

Exemple : « Je laisse 25 % de tous mes biens à Monsieur… »

• le legs à titre particulier consiste à laisser un ou plusieurs biens déterminés à une personne.

Exemple : « Je laisse 2.000 EUR à Monsieur… »


D.L’option


On n’est jamais obligé d’accepter une succession, qu’on soit héritier ou légataire.
Le « successible » a le choix entre trois possibilités :

• accepter purement et simplement : le « successible » acquiert donc tout l’actif de la succession mais il est également tenu de toutes les dettes de cette même succession sans limite. Par conséquent, si l’actif de la succession est insuffisant pour apurer l’ensemble des dettes, il devra payer ces dettes en prélevant dans son patrimoine propre ;

• accepter sous bénéfice d’inventaire : le « successible » acquiert tout l’actif de la succession mais n’est tenu du passif de cette même succession qu’à concurrence de la valeur de l’actif. Par conséquent, si le passif de la succession est plus élevé que l’actif, il a la garantie que son patrimoine propre ne pourra être atteint.

• renoncer.


E.Les régimes matrimoniaux


Les régimes matrimoniaux sont les règles qui gouvernent la situation patrimoniale des époux.

Elles n’ont normalement aucune influence sur la dévolution successorale mais peuvent, par contre, avoir une grande importance pour l’établissement de la composition de la succession. En effet, ces règles déterminent ce qui appartient à l’un ou à l’autre des époux en propre et ce qui leur est commun à tous les deux.

Deux principaux régimes matrimoniaux existent :

• le régime légal, qui est un régime de communauté. Ce régime est fondé sur l’existence de trois patrimoines :

- le patrimoine propre du mari ;
- le patrimoine propre de la femme ;
- le patrimoine commun.

Très succinctement, on peut dire que chacun des patrimoines propres se composent des biens qui appartenaient aux époux avant le mariage ainsi que des biens qu’ils ont recueillis, après cette date, par donation ou succession. Le patrimoine commun est, quant à lui, composé de tous les biens qui ne sont pas propres.

• la séparation des biens. Tout bien appartient en propre à l’un ou à l’autre des époux. Si les époux acquièrent un bien ensemble, il est soumis aux règles de l’indivision ordinaire.




François Collon (f.collon@vanhaelst-avocats.eu)
Avocat
Hirsch & Vanhaelst



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