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Les principales mesures fiscales de la loi-programme du 25 décembre 2016

Par François COLLON

Mardi 24.01.17

Comme cet été (on se souvient de la loi du 21 juillet 2016 relative à la procédure de régularisation fiscale), le Parlement n’a pas pris de congés en décembre, profitant du jour de Noël pour adapter sa désormais traditionnelle loi « fourre-tout » dont nous vous détaillons ici les principales mesures fiscales.


Frais de carburant et « intervention personnelle » (articles 67 à 73 de la loi-programme)

Conformément à l’article 198, § 1er, 9° du Code des impôts sur les revenus 1992 (ci-après « CIR 92 »), lorsqu’une société met une voiture à disposition d’un membre de son personnel, 17 % de l’avantage imposable dans le chef du bénéficiaire doit être ajouté à ses dépenses non admises.

Ce pourcentage est désormais porté à 40 % lorsque « les frais de carburant liés à l’utilisation personnelle sont, en tout ou en partie, pris en charge par la société ».

En outre, l’intervention personnelle éventuelle du bénéficiaire de l’avantage ne peut désormais plus être déduite de la base sur laquelle le montant de dépenses à rejeter doit être calculé.

Ces dispositions entrent en vigueur à compter du 1er janvier 2017.


Taxe sur la spéculation (articles 74 à 92 de la loi-programme)

Cet impôt de 33 %, entré en vigueur au 1er janvier 2016, 2016, s’appliquait aux plus-values réalisées par les personnes physiques, en dehors de l’exercice de leur activité professionnelle, sur des actions cotées en bourses et des produits dérivés (warrants, options, etc.) revendues dans les six mois de leur acquisition.

Elle est supprimée à compter du 1er janvier 2017.


Précompte mobilier (articles 93 à 95 de la loi-programme)

Le taux général du précompte mobilier passe à 30 % à partir du 1er janvier 2017.

En ce qui concerne la « réserve de liquidation », le précompte mobilier de 17 % qui est applicable en cas de distribution de dividendes par prélèvement sur cette réserve dans les cinq ans de sa constitution passe à 20 % mais uniquement pour les « réserves de liquidation constituées pour une période imposable qui se rattache au plus tôt à l’exercice d’imposition 2018 ». En d’autres mots, cette majoration de 3 % n’est pas applicable aux réserves déjà constituées à ce jour.


Plus-values internes (articles 96 à 99 de la loi-programme)

L’article 184, alinéa 3 du CIR 92 prévoit désormais que :

« Dans l'éventualité d'un apport d'actions ou parts pour lequel les plus-values, soit, sont exonérées en vertu de l'article 45, § 1er, alinéa 1er, 2°, et ne tombent pas sous l'exonération des plus-values sur actions ou parts prévue à l'article 192, soit, ne sont pas imposables conformément à l’article 90, alinéa 1er, 9°, premier tiret, ou à l’article 228, § 2, 9°, h, le capital libéré à l'occasion de l'échange de nouvelles actions ou parts émises par la société bénéficiaire de l'apport est égal à la valeur d'acquisition des actions ou parts apportées dans le chef de l'apporteur. »

Le régime s’applique aux apports de titres effectués par des résidents fiscaux belges à des sociétés belges ou étrangères et par des non-résidents à des sociétés belges. Les opérations de cession de titres autres que les apports ne sont pas visées.

Désormais, le capital libéré qui sera reconnu fiscalement dans le chef de la société bénéficiaire de l’apport sera égal à la valeur d’acquisition des titres apportés dans le chef de l’apporteur, et s’il n’est pas possible de l’établir, au capital libéré dont elles sont représentatives. Pour l’excédent, l’apport sera considéré comme une réserve taxée, distribuable moyennant l’application du précompte mobilier de 30 %.

Les ventes d’actions ne sont pas soumises à ce régime mais feront, à l’instar des opérations d’apport effectuées avant le 31 décembre 2016, l’objet d’un contrôle accru par l’administration fiscale sur la base de la disposition anti-abus prévue à l’article 344, § 1er du CIR 92.

La mesure est entrée en vigueur le 1er janvier 2017.


Excess Profit Ruling (articles 100 à 119 de la loi-programme)

Les articles 100 à 119 de la loi-programme instaure la procédure qui sera suivie par la Belgique en vue de la récupération de l’aide d’Etat indûment accordée à trente-cinq multinationales pour près de 700 millions d’euros.


TVA et logement social (articles 120 et 121 de la loi-programme)

A partir du 1er janvier 2017, l’acquisition ou la rénovation de logements (qui n’ont pas encore 10 ans) en vue de leur affectation en habitations sociales sera soumis au taux de TVA de 12%, sous réserve que celle-ci soit mise en location pendant minimum 15 ans à un intermédiaire qui le loue à des fins sociales - un CPAS, une société de logement ou une agence immobilière sociale.

Une déclaration préalable à l'acquisition, la construction ou la rénovation doit être introduite auprès du bureau TVA compétent. Une copie de cette déclaration est à fournir au vendeur de la nouvelle habitation ou à l'entrepreneur qui construit ou rénove l'habitation sociale. Enfin, v une copie du bail de location, conclu avec l'intermédiaire, doit être transmis au bureau de TVA compétent.


Taxe sur les opérations de bourse (articles 122 à 127)

Outre, un doublement des plafonds actuels de la taxe [(relèvement du plafond de 650 EUR à 1.300 EUR pour les opérations portant sur des obligations et instruments analogues (soumises à une taxe boursière de 0,09 %), de 800 EUR à 1.600 EUR pour les opérations portant sur des actions et autres instruments financiers (soumises à une taxe boursière de 0,27 %) et de 2.000 EUR à 4.000 EUR en cas de rachat d'actions de capitalisation de sociétés d'investissement (soumises à une taxe boursière de 1,32 %).], la loi-programme rend dorénavant la taxe applicable également lorsque les ordres émanent d'un donneur d'ordre établi en Belgique et qu'ils sont traités intégralement via un compte à l'étranger.

A partir du 1er janvier 2017, les opérations portant sur des instruments financiers sont également réputées conclues ou exécutées en Belgique et donc soumises à la taxe lorsque l'ordre (d'achat ou de vente) « est donné directement ou indirectement à un intermédiaire établi à l'étranger" (1) par une "personne physique ayant sa résidence habituelle en Belgique"; ou (2) par une "personne morale pour le compte d'un siège ou d'un établissement de celle-ci en Belgique ». La nouvelle disposition vise non seulement les opérations via des établissements bancaires, mais aussi via l'internet par des entités établies à l'étranger qui offrent une plateforme à des investisseurs belges.

La nouvelle disposition vise les ordres qui sont donnés soit par une personne physique ayant sa « résidence habituelle » en Belgique, soit par une personne morale pour le compte d'un siège ou d'un établissement de celle-ci en Belgique.

La mesure ne vise pas seulement les cas où l'ordre est donné « directement », mais également ceux où l'ordre est donné « indirectement ». On semble entendre l'hypothèse où l'ordre est donné par une construction juridique dont un résident belge est le « bénéficiaire effectif ».

Pour les opérations qui sont conclues ou exécutées en Belgique, c'est « l'intermédiaire professionnel » belge qui est redevable de la taxe. Rien ne change à cet égard.

Lorsque « l'intermédiaire professionnel est établi à l'étranger, le donneur d'ordre est redevable de la taxe ». Le donneur d'ordre doit donc assumer les obligations en matière de dépôt de déclaration et de paiement de la taxe auprès du bureau compétent. Il n'est dispensé de ces obligations de déclaration et de paiement que « s'il peut établir que la taxe a été acquittée », ce qui signifie que le paiement aura été effectué dans ce cas par l'intermédiaire étranger qui aura choisi de rendre ce service à sa clientèle. Pour ce faire, les intermédiaires professionnels non établis en Belgique « peuvent [...] faire agréer par le ministre des Finances ou son délégué un représentant responsable établi en Belgique ». Celui-ci « s'engage solidairement, envers l'Etat belge, au paiement des droits sur les opérations faites par l'intermédiaire professionnel, soit pour le compte de tiers, soit pour son compte propre, et à l'exécution de toutes les obligations dont l'intermédiaire professionnel est tenu ». Les conditions d'agrément d'un représentant responsable doivent encore être fixées par arrêté royal.

Le dépôt de la déclaration et le paiement de la taxe doivent normalement avoir lieu dans le mois qui suit celui de l'opération. Toutefois, lorsque le donneur d'ordre doit assumer lui-même le dépôt de la déclaration et le paiement de la taxe, le délai est de deux mois.

Ces obligations sont également assorties de sanctions. Ainsi, l'amende en cas de dépôt tardif de la déclaration est égale à 50 EUR par semaine de retard. Un régime transitoire sera d’application durant l’année 2017 : l'amende s’élèvera à 12,50 EUR par semaine de retard en cas de dépôt tardif de la déclaration jusqu'au 30 juin 2017, et à 25 EUR par semaine de retard en cas de dépôt tardif de la déclaration durant la période comprise entre le 1er juillet 2017 et le 31 décembre 2017.


Décimes additionnels sur les amendes pénales (article 59 de la loi-programme)

Les amendes pénales (dont celles prononcées en matière fiscale) sont majorées de décimes additionnels (loi du 5 mars 1952 relative aux décimes additionnels sur les amendes pénales). A partir du 1er janvier 2017, les décimes additionnels passent de 50 à 70, ce qui signifie qu’il faut désormais multiplier par 8 et non plus par 6 le montant de l’amende prévu par la législation afin d’obtenir le montant dû.





François COLLON (f.collon@vanhaelst-avocats.eu)
Avocat au barreau de Bruxelles
Hirsch & Vanhaelst




Source : DroitBelge.Net - actualités - 24 janvier 2017


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