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Les prestataires de soins devront s'assurer



Actuellement, il est vivement conseillé au prestataire de soins de souscrire une assurance R.C. professionnelle couvrant les dommages pouvant résulter de son activité professionnelle, ce pour autant que sa responsabilité soit engagée.

Le 1er janvier 2008, la souscription d’une telle assurance professionnelle deviendra une obligation légale. Ce contrat reste soumis à la loi du 25 juin 1992 sur le contrat d’assurance terrestre (sous réserves de quelques spécificités précisées par le nouvelle loi).


A/ Le caractère obligatoire de l'assurance

Par une loi du 15 mai 2007, loi relative à l’indemnisation des dommages résultant de soins de santé, publiée au Moniteur belge le 6 juillet 2007 et entrant en vigueur à dater du 1er janvier 2008, le législateur a fait choix d'indemniser des dommages résultants de soins de santé (1) . Sauf exceptions, le patient « victime » ne sera plus autorisé à diligenter une action en responsabilité à l’encontre du prestataire de soins (2) .

Le législateur a rendu, dans le chef de tous les prestataires de soins (relevant de l'arrêté royal n°78 du 10 novembre 1967 relatif à l'exercice des professions de soins de santé), obligatoire la souscription d'une assurance professionnelle (3) devant couvrir:

- la réparation des dommages résultant d'une prestation de soins de santé,

- de l'absence d'une prestation de soins de santé que le patient pouvait légitimement attendre compte tenu de l'état de la science,

- d'une infection contractée à l'occasion d'une prestation de soins de santé.


B/ L'assuré

Le contrat d'assurance doit couvrir tous les risques résultant d'un dommage causé tant par le prestataire de soins que par les organes et les préposés de ce prestataire de soins lorsqu'ils agissent sous la responsabilité ou le contrôle de ce dernier (4) .

Lorsque le prestataire de soins exerce au sein d'une institution de soins (5) , le législateur a précisé ce qu'il suit (6) :

"Le contrat d'assurance doit couvrir toutes les prestations des personnes travaillant au sein de l'institution de soins et toutes les prestations effectuées sous la responsabilité du praticien.

Sauf disposition contraire, l'assurance d'une institution de soins couvre toutes les prestations de tous les praticiens y exerçant une activité à titre principal ou accessoire.

La disposition contraire visée à l'alinéa 2 ne peut avoir pour effet que l'institution de soins n'est pas tenue de couvrir l'ensemble des prestations effectuées en son sein par des praticiens
."

Il y a dès lors lieu de considérer qu'il appartient à l'hôpital de souscrire une assurance couvrant toutes les prestations effectuées en son sein par les prestataires autorisés à y exercer leur art.

En outre, sauf disposition contraire, le contrat d'assurance couvre aussi les prestations des prestataires attachés à l'institution, effectuées hors de l'institution.

Aussi, si le contrat d’assurance souscrit par l’institution de soins vient à exclure de la garantie les dommages pouvant résulter de prestations de soins réalisées en dehors de son enceinte (ex. dans le cadre d’une activité extra-hospitalière), il appartient au prestataire de soins de veiller à s'assurer individuellement pour couvrir de telles prestations.


C/ Le caractère individualisable des primes payées en application du contrat d'assurance groupe

Le législateur impose de déterminer des règles permettant d'individualiser la prime d'assurance par prestataire de soins, prime due en raison de la souscription d'un contrat d'assurance groupe (7) .

Ces règles relatives à l'individualisation desdites primes doivent être contenues dans la réglementation générale des rapports juridiques de chaque institution de soins. Elles doivent garantir la possibilité d'individualiser annuellement les primes de chaque praticien en fonction de sa spécialité, de son activité, sans que la répercussion de ces primes puisse excéder les coûts réels.


D/ L'objet de la garantie souscrite

L'assureur doit répondre des dommages causés par le fait ou la faute, même lourde, des prestataires de soins ou du patient (8) .

Toute clause qui aurait pour objet de limiter, restreindre ou supprimer l'étendue ou les délais de la garantie ou de la couverture sont réputées non écrites.

Le législateur a veillé à définir les situations pouvant être considérées comme des cas de faute lourde (9) :

- le dommage consécutif à un état d'intoxication alcoolique ou sous l'influence de stupéfiants, à moins que le prestataire de soins prouve qu'il n'existe pas de lien de causalité entre cet événement et le sinistre,

- le dommage résultant d'un refus d'assistance à une personne en danger dont l'auteur a été condamné en application de l'article 422bis du Code pénal,

- le dommage consécutif à l'exercice d'activités interdites en application des dispositions de l'arrêté royal n°78 relatif à l'exercice des professions de soins de santé.

Dans de telles situations, l'assureur sera éventuellement contraint d'indemniser la victime, mais bénéficiera d'un recours subrogatoire à l'encontre du prestataire de soins.


E/ Le montant de la garantie souscrite

La garantie ne peut être limitée à un montant inférieur à 2.176.393,29 EUR par victime. Ce montant est lié à l'indice pivot 103,14 (base 1996 qui est égale à 100) et est adapté à l'indice des prix à la consommation d'une manière identique à celle en vigueur pour les pensions (10) .


F/ Le recours subrogatoire

L'assureur sera autorisé à récupérer auprès du prestataire de soins (en ce compris auprès de l’institution de soins) les indemnités versées à la victime dans les seuls cas de faute intentionnelle ou de faute lourde.


G/ Le Fonds commun de garantie

Il appartiendra au Roi de créer et d'agréer un Fonds commun de garantie.

Au sein de ce Fonds commun de garantie, est créé un bureau de tarification. Ce bureau de tarification aura pour mission d'établir la prime et les conditions auxquelles une entreprise d'assurances est tenue de couvrir un prestataire de soins soumis à l'obligation d'assurance lorsque au moins trois entreprises d'assurances auxquelles il s'est assuré ont refusé de lui accorder une couverture.


G/ Dispositions pénales

Le législateur a érigé l'absence de souscription d'assurance en une infraction pénale.

Ainsi, sont punis d'un emprisonnement de 8 jours à 1 an et d'une amende de 25 à 250 EUR ou d'une de ces peines seulement, les prestataires de soins et les institutions de soins qui exercent leur activité ou laissent exercer des activités de leurs organes, préposés, employés, ou de tout autre praticien ou prestataire de soins qui exerce ses activités à titre principal ou accessoire, sans que leurs prestations soient couvertes par une assurance.


H/ Entrée en vigueur

La loi du 15 mai 2007 relative à l'indemnisation des dommages résultant de soins de santé, publiée au Moniteur belge le 6 juillet 2007, entrera en vigueur le 1er janvier 2008. Ladite loi ne peut s'appliquer aux dommages résultant d'un fait antérieur à son entrée en vigueur.

Bien que de nombreuses dispositions requièrent l'adoption d'arrêtés royaux d'exécution, le principe de l'assurance obligatoire entrera en vigueur à la date du 1er janvier 2008.






Isabelle LUTTE
Avocat - Thelius



Notes:

(1) Loi du 15 mai 2007, Mon.B., 6 juillet 207, article 3.

(2) Loi du 15 mai 2007, Mon.B., 6 juillet 2007, article 7§1er.

(3) Loi du 15 mai 2007, Mon.B., 6 juillet 207, article 8.

(4) Loi du 15 mai 2007, Mon.B., 6 juillet 207, article 9.

(5) Par institution de soins, il y a lieu d’entendre institution réglementée par loi du 7 août 1987, loi coordonnée sur les hôpitaux, l’hôpital militaire, les centres de transfusion. Ne sont pas visés par la nouvelle loi les maisons de repos et de soins, les ambulances…

(6) Loi du 15 mai 2007, Mon.B., 6 juillet 207, article 10.

(7) Loi du 15 mai 2007, Mon.B., 6 juillet 207, article 10.

(8) Loi du 15 mai 2007, Mon.B., 6 juillet 207, article 11, 1er§.

(9) Loi du 15 mai 2007, Mon.B., 6 juillet 207, article 7§4..

(10) Le montant de la garantie minimale est ainsi portée à 2.500.000,00 €.





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