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Responsabilité pour violation des statuts ou du Code des sociétés



1. L’article 528 du Code des sociétés (pour les SA, l’article 263 C. Soc prévoit un régime similaire dans les SPRL) prévoit que : « les administrateurs sont solidairement responsables, soit envers la société, soit envers les tiers, de tous dommages et intérêts résultant d’infractions aux dispositions du présent code ou des statuts sociaux.

L’alinéa 1er est également applicable aux membres du comité de direction.

En ce qui concerne les infractions auxquelles ils n’ont pas pris part, les administrateurs et les membres du comité de direction ne seront déchargés de la responsabilité visée aux alinéas 1er et 2 que si aucune faute ne leur est imputable et s’ils ont dénoncé ces infractions selon le cas, lors de la première assemblée générale ou lors de la première séance du conseil d’administration suivant le moment où ils en ont eu connaissance
».

2. A la différence de la responsabilité pour faute de gestion, qui est une responsabilité individuelle, la responsabilité pour violation de disposition du Code des sociétés ou des statuts est une responsabilité solidaire de tous les administrateurs ou membres du comité de direction. Ceci implique que :

- tous les administrateurs ou membres du comité de direction sont présumés coresponsables, sans qu’il faille rechercher celui ou ceux qui ont commis

- chaque administrateur ou membre du comité de direction est responsable vis-à-vis de la personne préjudiciée, solidairement : il pourra être tenu de réparer seul l’intégralité du préjudice (et pourra se retourner ensuite contre les autres administrateurs ou membres du comité de direction, déduction faite de sa part dans le montant de l’indemnisation bien entendu).

Pour échapper à la mise en cause de sa responsabilité, l’administrateur ou le membre du comité de direction qui considère ne pas avoir participé à la faute, doit d’une part prouver qu’il n’a pris part à la violation des statuts ou du Code des sociétés et, d’autre part, dénoncer la faute lors de la première assemblée générale ou lors de la première réunion du conseil d’administration qui suit.

Il en découle indirectement pour chaque administrateur ou membre du comité de direction un devoir de présence, d’information et de contrôle de ce qui se passe au sein des organes. S’il est absent, mal informé ou qu’il ne contrôle pas la légitimité des décisions qui sont prises par ces pairs, il engagera sa responsabilité en cas de violation des statuts ou du Code des sociétés.

Exemples de manquements :

- de violation du Code des sociétés :

o ne pas publier les actes au Moniteur belge (nomination, démission, de révocation du/des dirigeant(s)) ou à la Banque Nationale (comptes annuels et dans certaines circonstances les informations complémentaires exigées par le Code),

o le défaut de convocation de l’assemblée générale, de manière générale (pour approbation des comptes), à la demande d’actionnaires (dans le cadre de l’article 532 C. Soc, quand des actionnaires représentant au moins un cinquième du capital en font la demande), lorsqu’à la suite de pertes, l’actif net de la société est réduit à la moitié ou au quart du montant du capital social (art. 633. C. Soc pour les SA, art 332 C. Soc dans les SPRL et art. 431 C. Soc pour les SCRL),

o ne pas respecter les règles en matière de rapport de l’organe de gestion (transformation de société, augmentation de capital par apport en nature, quasi-apports, dans le cadre d’une augmentation de capital dans les limites du capital autorisé, dans le cadre de la modification des statuts, d’opérations de fusion ou scission, etc.),

o le fonctionnement irrégulier de l’organe de gestion,

o défaut de répondre aux questions des actionnaires à l’assemblée générale,

o ne pas fournir aux commissaires aux comptes les informations,

o la tenue irrégulière du registre des actionnaires,

o ne pas respecter les procédures particulières dans le cadre d’une prise de décision comportant un conflit d’intérêts pour un ou plusieurs administrateurs (une procédure particulière est à respecter si un administrateur a un intérêt personnel dans la prise d’une décision pour la société, créant un conflit d’intérêts),

o etc.

- de violation des statuts :

o l’octroi par le dirigeant d’une rémunération pour son mandat, alors que les statuts prévoient que le mandat est exercé à titre gratuit,

o le non-respect de clauses statutaires limitant les pouvoirs de l’organe de gestion. Pour rappel, ces clauses sont inopposables aux tiers et la société devra exécuter les actes conclu. Elle pourra cependant par la suite se retourner contre les administrateurs pour obtenir réparation du préjudice subi par elle,

o le fait de poser des actes au nom de la société qui sortent du cadre de l’objet social,


3. La responsabilité pour violation de la loi ou des statuts peut être mise en cause par la société elle-même (par l’exercice de l’action sociale ou de l’action minoritaire – v. infra) et par les tiers.

Le demandeur devra toujours bien entendu prouver le préjudice subi et le lien de causalité entre la faute et le préjudice. Dans certaines hypothèses, cette condition sera difficile à remplir (par exemple, il sera difficile de prouver qu’un préjudice a été causé parce que le gérant a convoqué trop tard une assemblée générale dans le cadre de l’application de l’article 633 C. Soc (à la suite de pertes, l’actif net est réduit à la moitié du capital social)).



Pierre Paulus de Châtelet
Avocat au barreau de Bruxelles


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