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Participation des détenteurs de titres – le droit de vote



A défaut de disposition contraire, chaque titre représentatif du capital social donne droit à un droit de vote.

Lorsqu’elles sont de valeur égale, chaque action donne droit à une voix. Lorsqu’elles sont de valeur inégales ou lorsque leur valeur n’est pas exprimée, chaque action confère un nombre de voix correspondant à la proportion du capital qu’elle représente en comptant pour une voix l’action représentant la quotité la plus faible.

La Belgique ne connaît donc pas le système d’actions à vote plural qui est présent dans d’autres pays européens notamment (voir le chapitre concernant les actions à vote plural, dans la fiche "Les actions".).

Les statuts de la société peuvent limiter le nombre de voix dont chaque actionnaire dispose à l’assemblée générale, à condition que cette limitation s’applique à tous les actionnaires quels que soient les titres pour lesquels il prend part au vote.


Vote par procuration

Chaque actionnaire possédant le droit de voter à l’assemblée générale peut donner mandat à une autre personne (un actionnaire ou un tiers) de voter pour lui. Les statuts ne peuvent supprimer la possibilité de voter par procuration ou proscrire la représentation par un tiers non actionnaire.

Le mandataire votera conformément aux instructions données par le mandant. Il pourra cependant s’en écarter si des circonstances particulières, inconnues au moment où le mandat a été accordé, le commandent, ou si l’exécution de ces instructions pourrait en définitive nuire aux intérêts du mandant. Dans ce cas, le mandataire devra évidemment en informer le mandant. S’il n’a pas reçu d’instructions de la part du mandant (qui n’est nullement obligé de lui en donner), il votera librement.


Pactes de votation

Les actionnaires d’une SA peuvent se mettre d’accord sur le sens dans lequel leur vote sera exercé lors de l’assemblée générale. Cet accord peut être intégré soit dans les statuts, soit dans des conventions privées.

On utilise ce type de mécanisme afin par exemple d’assurer la nomination de tel ou tel administrateur ou encore afin de permettre à chaque groupe d’actionnaires d’avoir un représentant au sein du conseil d’administration.

Intégrer cet accord dans une disposition statutaire présente l’avantage de l’opposabilité aux tiers dès la publication au Moniteur Belge et de ne pas être soumise aux conditions de l’article 551 du Code des sociétés (v. ci-dessous). Il sera moins facilement modifiable ou annulable dans la mesure où il faudra pour ce faire une décision de l’assemblée générale, soumise aux conditions de quorum et de majorité requises pour une modification des statuts.

Une convention privée présente quant à elle l’avantage de la confidentialité et est plus facilement modifiable. Elle est cependant soumise au respect des conditions dictées par l’article 551 du Code des sociétés qui exige que de telles clauses soient :

• justifiées par l’intérêt social de la société ;

• limitées dans le temps ;

• conformes aux dispositions du Code des sociétés.

Les pactes de votations ne peuvent en outre, sous peine de nullité, consister en :

• un engagement de voter conformément aux directives données par la société, par une filiale ou par un organe de ces sociétés ;

• un engagement d’un associé avec les mêmes sociétés ou les mêmes organes à approuver les propositions émanant des organes de la société.

Nous renvoyons pour le surplus au chapitre consacré aux pactes d’actionnaires.


Suspension ou suppression du droit de vote

Dans certaines hypothèses, le droit de vote est suspendu :

• le droit de vote correspondant à des actions non intégralement libérées est suspendu jusqu’à ce que l’actionnaire ait intégralement libéré son apport correspondant à ces actions ;

• lorsqu’une SA ne respect pas l’interdiction énoncée par l’article 442, §1er du Code des sociétés (prohibant la souscription par une société de ses propres parts ou certificats), tous les droits afférents aux parts ou aux certificats concernés sont suspendus tant qu’ils n’auront pas été aliénés ;

• lorsque des actions, parts bénéficiaires, obligations, droits de souscriptions ont plusieurs propriétaires, la SA peut suspendre le droit de vote sur ces titres tant que une personne n’ait pas été désignée comme étant, vis-à-vis de la société, le propriétaire du/des titre(s) concerné(s) ;

• les statuts peuvent prévoir des limitations du droit de vote dont chaque actionnaire dispose à l’assemblée à condition que cette limitation s’impose à tout actionnaires, quelles que soient les actions pour lesquels il prend part au vote ;

• lorsqu’une SA a acquis ses propres actions, parts bénéficiaires ou certificats, le droit de vote attachés à ses titres est suspendu ;

• lorsque deux sociétés indépendantes, dont une SA ayant son siège en Belgique, ont des participations croisées (d’action, certificats ou parts bénéficiaires) à concurrence de plus de 10% des voix attachées à l’ensemble des titres dans le capital de l’autre, le droit de vote attaché aux titres détenus en participations croisées est suspendu ;

• lorsqu’un SA a pris en gage ses propres actions ou parts bénéficiaires, la personne agissant en son nom propre mais pour le compte de la société ne peut exercer le droit de vote attaché aux titres remis en gage ;

• lorsque des filiales (qui peuvent être des SA, SPRL ou SCRL) ont ensemble une participation de plus de 10% des voix attachés à l’ensemble des titres de leur société mère qui est une SA, les droits de vote attachés à ces titres sont suspendus ;

• lorsqu’une procédure de cession ou de rachat forcé de titres est introduite devant le tribunal de commerce, celui-ci peut prendre la décision de suspendre le droit de vote attaché aux titres dont la cession / le rachat est demandé en justice.

Dans d’autres hypothèses, le droit de vote est inexistant :

Les détenteurs d’actions sans droit de vote (v. chapitre sur les titres dans les SA) ne disposent logiquement pas de ce droit lors de l’assemblée générale sauf dans les cas suivants :

• si une des conditions suivantes, préalables à la possibilité pour la société d’émettre des actions sans droit de vote, n’est plus remplie, c'est-à-dire si :

-les actions sans droit de vote représentent à un moment plus d’un tiers du capital social,
-les actions sans droit de vote ne confèrent plus, en cas de bénéfice distribuable, de droit à un dividende privilégié et, sauf disposition contraire des statuts, récupérable, ainsi que de droit dans la répartition de l’excédent des bénéfices,
-les actions sans droit de vote ne confèrent plus de droit privilégié au remboursement de l’apport en capital augmenté, le cas échéant de la prime d’émission, et de droit dans la distribution du boni de liquidation (qui ne peut être inférieur à celui attribué aux parts avec droit de vote).

• en cas de modification des statuts ;

• lorsque l’assemblée générale doit délibérer sur une suppression ou sur une limitation du droit de préférence, sur l’autorisation donnée au conseil d’administration d’augmenter le capital en supprimant ou limitant le droit de préférence, sur la réduction de capital, sur la modification de l’objet social, sur la transformation de la société ou sur la dissolution, la fusion ou la scission de la société ;

• si, pour quelques causes que ce soit, les dividendes privilégiées et récupérables n’ont pas été mis entièrement en paiement durent trois exercices successifs et cela, jusqu’au moment où ces dividendes auront été entièrement récupérées.

Cas particuliers :

• actions en usufruit : lorsque la propriété d’une action est démembrée en d’une part l’usufruit et, d’autre part, la nue-propriété, le droit de vote peut être suspendu par la société jusqu’à ce que le nu-propriétaire et l’usufruitier se soient mis d’accord quant à qui exercera le droit de vote attaché à cette action, ou que l’un d’eux soit désigné comme titulaire de ce droit de vote.


• actions mises en gage : la mise en gage d’action n’entraîne pas de transfert de propriété. Le propriétaire des actions garde donc son droit de vote mais les parties pourraient prévoir de commun accord que le créancier gagiste exerce celui-ci.




Pierre Paulus de Châtelet
Avocat au barreau de Bruxelles - Association De Caluwé & Horsmans



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