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Gestion de la S.P.R.L.



Statut des gérants d’une SPRL

Il peut y avoir un ou plusieurs gérants dans une SPRL.

Le gérant peut être une personne physique ou une personne morale (depuis la loi du 2 août 2002, dite corporate governance ). Il ne doit pas spécialement être associé dans la SPRL ou être commerçant. Il doit par contre répondre aux conditions d’aptitude fixées par la loi du 15 décembre 1990 relative à l’accès à la profession dans l’artisanat et le petit commerce.

Comme le gérant engage la société et non lui-même personnellement, un mineur, même non émancipé, peut être nommé gérant d’une SPRL. Cependant, cette situation comporte un risque dans la mesure ou sa responsabilité civile ou pénale ne peut être engagée.

Ne peuvent être nommés gérants les personnes énumérées par les dispositions de l’arrêté royal n° 22 du 24 octobre 1934 relatif à l'interdiction judiciaire faite à certains condamnés et aux faillis d'exercer certaines fonctions, professions ou activités (Moniteur Belge du 27 octobre 1934)

Certaines personnes, comme les membres de l’ordre judiciaire et de la fonction publique, les avocats, les huissiers et notaires ainsi que les réviseurs d’entreprise ne peuvent en principe être nommés gérants (sauf exceptions)


Nomination et révocation

Le gérant d’une SPRL est nommé par l’assemblée générale des associés, pour une durée déterminée ou indéterminée.

Il peut être:

• statutaire : il est nommé dans l’acte constitutif ou par une assemblée générale extraordinaire modifiant les statuts pour y prévoir la nomination. Il bénéficie dés lors d’une stabilité accrue de son poste (v. infra).

• non statutaire : il est alors nommé par une assemblée générale ordinaire. Il est alors simple mandataire social, révocable ad nutum.

Les nominations doivent être publiées au Moniteur Belge.

S’il y a plusieurs gérants, ils forment un collège de gestion. Le principe n’est, contrairement aux S.A., pas la collégialité de l’organe puisqu’en vertu de l’article 257 du Code des sociétés, chaque gérant peut agir et engager seul la SPRL, sauf restrictions légales ou statutaires.


Régime juridique applicable

Vis-à-vis de la société, le gérant est un mandataire et les règles du mandat s’appliquent.

Le poste de gérant est gratuit ou rémunéré. En cas d’absence de précision sur ce point dans les statuts, le mandat est présumé être rémunéré mais la question reste controversée dans la mesure où le mandat est un contrat naturellement gratuit (article 1986 du Code civil).

En principe, le gérant ne peut être engagé par un contrat de travail, du moins pour ses fonctions de gérant. Dans cette hypothèse, les taches pour lesquelles il intervient doivent se distinguer clairement de sa mission de gérant et un lien de subordination doit exister, de telle manière qu’une autre personne (comme le collège de gestion s’il y a plusieurs gérants) doit pouvoir lui donner des ordres.

Vis-à-vis des tiers, le gérant est l’organe de la SPRL et engage celle-ci valablement. Les restrictions statutaires aux pouvoirs du gérant ne sont pas opposables aux tiers, même si elles sont publiées (article 257 C. Soc), sauf s’il peut être prouvé que ceux-ci savaient ou ne pouvaient ignorer que le gérant dépassait le cadre de ses compétences.


Exercice de la fonction de gérant

Conformément au principe de la compétence résiduaire de l’organe de gestion dans les société commerciales, en vertu de l’article 257 du Code des sociétés, chaque gérant peut accomplir tous les actes de disposition et d’administration qui intéressent la société, à l’exception des pouvoirs qui sont réservés expressément par le Code des sociétés ou par les statuts à l’assemblée générale des associés.

En ce qui concerne les restrictions statutaires, il faut distinguer celles qui se rapportent aux pouvoirs internes de celles qui se rapportent aux pouvoirs de gestion externes.

Les premières consistent pour les associés d’une SPRL à retirer certains pouvoirs ou compétences au gérant afin de les transférer à l’assemblée générale ou de limiter une compétence à un certain seuil au dessus duquel la prise de décision reviendra à l’assemblée générale (pouvoir de signature jusqu’à un certain seuil).

L’article 257, alinéa 2 C. Soc prévoit que ces restrictions statutaires aux pouvoirs de gestion interne ne sont pas opposables aux tiers, même en cas de publication au Moniteur Belge. La société sera donc toujours liée par ces actes du gérant, quitte pour elle à se retourner contre celui-ci sur base de l’article 263 C. Soc.

Conformément aux règles du mandat, il n’en sera autrement que si le tiers savait ou ne pouvait pas ignorer que le gérant sortait du cadre de son mandat. Il faudra donc prouver la mauvaise fois du tiers en prouvant d’une part que le tiers avait connaissance des statuts et d'autre part, le manque de conformité de l’acte posé par rapport à ceux-ci. En pratique, cette preuve sera particulièrement difficile à apporter.

Il est à noter que, les restrictions n’étant qu’internes à la société, cet argument de nullité de l’acte posé pour mauvaise foi du tiers ne pourra être invoqué que par la société et non par le tiers qui désirerait se délier de l’acte conclu.

Les restrictions aux pouvoirs externes du gérant sont par contre opposables aux tiers si elles concernent le pouvoir général de représentation (et non pas certains actes déterminés) et si elles ont été publiées (Article 257, alinéa 3 C. Soc). Les statuts peuvent donc prévoir que la société sera valablement représentée auprès des tiers et en justice par un ou plusieurs gérants que les statuts désigneront nommément, ou par plusieurs gérants agissatn conjointement (comme une clause de double signature).


Délégation de pouvoirs

Le gérant peut, conformément au droit du mandat, déléguer certains pouvoirs déterminés à une ou plusieurs personnes. La délégation doit être spéciale et ne peut en aucun cas être générale.


Absence de délégation journalière

Il n’y a pas de délégation à la gestion journalière dans une SPRL. Il n’est pas non plus admis comme palliatif à cette règle de déléguer à une personne l’ensemble des pouvoirs rentrant dans la définition de la gestion journalière.

Certains pouvoirs spécialement énumérés et rentrant dans la définition générale de gestion journalière peuvent être délégués à une personne déterminée, le délégué ne sera que mandataire spécial et ne pourra par conséquent en aucun cas être considéré comme organe de la société.


Fin du mandat de gérant – modalités

Le mandat de gérant prend fin de cinq manières : la révocation, la démission, le décès ou l’interdiction du mandataire, la dissolution de la SPRL et, comme pour tout contrat, l’expiration de la durée du mandat, prévue lors de la nomination du gérant.


Révocation du gérant

Il faut faire une distinction entre le gérant :

• non statutaire : est révocable ad nutum, comme un administrateur de S.A.. Les statuts peuvent aménager les modalités de révocation sans que cela puisse déroger à ce principe.

• statutaire : est en principe irrévocable si le mandat est à durée indéterminée. Dans le cas contraire, le mandat prendra fin à l’expiration de ce terme.

Le gérant statutaire pourra cependant voir son mandat révoqué dans les trois hypothèses suivantes :

o les statuts peuvent déroger à l’irrévocabilité ;
o décision unanime en ce sens des associés, y compris du gérant s’il est lui-même associé ;
o révocation pour motifs graves tels que son incompétence, une faute grave du gérant ou pour toute autre raison rendant la poursuite du mandat impossible (maladie, …). L’assemblée générale qui prendra la décision de révocation devra respecter les conditions de quorum et majorité pour la modification des statuts et la pertinence du motif grave pourra être soumise à l’appréciation du tribunal de commerce en cas de contestation.

Si le gérant a été engagé également en vertu d’un contrat de travail, les conditions de la loi du 3 juillet 1978 sur le contrat de travail devront s’appliquer.


Démission

Le gérant statutaire ou non statutaire peut démissionner de ses fonctions. Cette démission constitue un acte juridique unilatéral irrévocable qui produit par conséquent ses effets indépendamment de l’accord des associés. La prochaine assemblée générale ordinaire ou une assemblée générale extraordinaire convoquée prendra acte de la démission.

Cette démission ne peut cependant et évidemment pas se faire dans des conditions qui porteraient préjudice à la société. En vertu de cette règle, si l’assemblée générale ne peut le forcer à rester en fonction, il se peut qu’il ne puisse cependant les quitter, dans certaines circonstances, qu’au moment ou un nouveau gérant aura été nommé.

Afin de se prémunir contre des situations délicates, on pourra par exemple prévoir l’obligation pour le gérant de convoquer une assemblée générale en cas de démission, afin que les associés puissent rapidement prendre acte de la démission et nommer un nouveau gérant.

De même, les statuts peuvent prévoir des modalités de préavis ou de notification de cette démission.

Encore, étant donné que le Code des sociétés ne prévoit pas pour les SPRL de mécanisme de cooptation de gérant en cas de démission du gérant de la société (comme dans une S.A.), il est possible pour l’assemblée générale de nommer en même temps que ce gérant, un suppléant.

Si aucun gérant n’est nommé suite à la démission du gérant de la SPRL, les associés exercent la gestion de manière concurrente.


Arrivée à terme du mandat

Le contrat de mandat, comme tout contrat, prend fin à l’expiration du terme pour lequel il a été conclu. Le gérant ne doit pas attendre la décharge de l’assemblée générale pour être libéré de son mandat.




Pierre Paulus de Châtelet
Avocat au barreau de Bruxelles - Association De Caluwé & Horsmans



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